Pesticides : définition, types et usages

Les pesticides, appelés aussi « produits phytopharmaceutiques », « produits antiparasitaires » ou « biocides » selon les contextes, sont des substances chimiques ou biologiques utilisées pour contrôler des organismes jugés nuisibles, indésirables, gênants ou envahissants tels que les animaux ravageurs des cultures, les microorganismes phytopathogènes, les vecteurs de maladies humaines et animales, les plantes et les animaux invasifs, etc.. Ces organismes peuvent interférer avec les cultures agricoles, la santé humaine et animale, le bien-être ou l’environnement.

Le mot « pesticide » vient de l’anglais pest, qui signifie « nuisible » ou « ravageur », lui-même issu du français « peste » et du latin pestis (« fléau »), et du suffixe « –cide », venant du latin caedere, qui signifie « tuer ». Dans le langage scientifique et courant, le terme désigne donc toutes les substances qui servent à tuer, repousser, attirer, piéger ou contrôler des organismes nuisibles, ou à réguler la croissance des plantes.

Définitions officielles (FAO / OMS)
 
Pesticide : « toute substance, ou mélange de substances, d’origine chimique ou biologique, destinée à repousser, détruire ou contrôler tout organisme nuisible, ou à réguler la croissance des plantes ».
 
Organisme nuisible : « toute espèce, souche ou biotype de plante, d’animal ou d’agent pathogène nuisible aux plantes et aux produits végétaux, aux matériaux ou à l’environnement, et incluant les vecteurs de parasites ou de pathogènes responsables de maladies humaines ou animales, ainsi que les animaux causant des nuisances pour la santé publique ». 

Les organismes ciblés : nuisibles

Un organisme est considéré comme nuisible lorsqu’il interfère négativement avec les activités humaines (agriculture, élevage), la santé, le bien-être ou l’environnement. Cette notion est donc anthropocentrique et peut varier selon le contexte. Par exemple, le moustique est nuisible lorsqu’il pique les humains ou transmet des maladies, mais certaines espèces peuvent aussi participer à la pollinisation. De même, une mauvaise herbe peut gêner la culture d’une plante, mais ses fleurs peuvent attirer des pollinisateurs utiles pour le jardin ou la biodiversité locale.

 Parmi les organismes considérés comme nuisibles :

  • les agents microbiens phytopathogènes : champignons, oomycètes, bactéries et virus provoquant des maladies des plantes. 
  • les animaux ravageurs : insectes, acariens, nématodes, mollusques, rongeurs, etc. qui s'attaquent aux cultures, aux denrées stockées et aux forêts. 
  • les animaux vecteurs : certains insectes et acariens transmettant des maladies aux humains ou aux animaux (ex. moustiques, tiques).
  • les mauvaises herbes : plantes non désirées dans les cultures, également appelées adventices des cultures.
  • les espèces exotiques envahissantes : plantes ou animaux introduits volontairement ou accidentellement dans un nouvel environnement et qui menacent la biodiversité locale.

Les ravageurs, les agents phytopathogènes et les mauvaises herbes sont habituellement considérés comme des bioagresseurs ou ennemis des cultures, contrairement aux auxiliaires utiles tels que les prédateurs, parasitoïdes et antagonistes employés en lutte biologique, les décomposeurs du sol ou encore les pollinisateurs, qui contribuent à la santé et à la productivité des cultures. 

Les pesticides peuvent être classés selon les organismes visés, selon leur usage, selon leur nature et famille chimique ou encore selon leur toxicité ou dangerosité pour la santé ou l'environnement. 


Classes fonctionnelles de pesticides selon les organismes visés

Les pesticides regroupent des substances chimiques ou biologiques destinées au contrôle ciblé d’organismes considérés comme nuisibles dans l’agriculture, l’horticulture, la sylviculture, ou d’autres contextes. Ils sont le plus souvent classés en fonction des organismes visés.

  • les herbicides, phytocides ou désherbants éliminent les mauvaises herbes ou adventices des cultures, ainsi que les broussailles ligneuses ou les souches (phytocides) et certaines mousses.
  • les fongicides éliminent, inactivent ou inhibent la croissance des champignons et oomycètes phytopathogènes ou parasites ainsi que des moisissures.
  • les insecticides tuent les insectes ravageurs ou vecteurs de maladies.
  • les acaricides éliminent les acariens phytophages, parasites ou vecteurs de maladies.
  • les nématicides ou nématocides tuent les vers nématodes (vers microscopiques ronds non segmentés) phytophages ou parasites.
  • les molluscicides ciblent les gastéropodes phytophages (limaces et escargots) et éventuellement vecteurs de maladies.
  • les rodenticides et taupicides tuent les petits rongeurs (rats, souris) et les taupes
  • les algicides éliminent ou inhibent la croissance des algues unicellulaires et filamenteuses.
  • les bactéricides détruisent ou inhibent la croissance des bactéries pathogènes.
  • etc.

Selon les définitions, les pays ou les auteurs, les pesticides peuvent également inclure : 
  • les désinfectants qui éliminent l'ensemble des microorganismes pathogènes (bactéries, moisissures, amibes, virus);
  • les répulsifs, qui éloignent les insectes (insectifuges), les oiseaux (avifuges) ou encore le gibier comme les cervidés, les sangliers ou les lièvres, tandis que les appâts attirent ces mêmes organismes;
  • les médiateurs chimiques (sémiochimiques) comme les phéromones d’insectes et autres substances modulant le comportement des individus d’une même espèce ou d’autres espèces (confusion sexuelle, pièges, répulsifs, etc.); 
  • les stimulateurs des défenses naturelles des plantes (SDP ou SDN) qui renforcent la capacité des plantes à résister aux bioagresseurs;
  • les substances ou régulateurs de croissance des végétaux, comme les défoliants, qui provoquent la chute des feuilles afin de faciliter certaines opérations agricoles ou de limiter la propagation de ravageurs ou maladies. 

Les herbicides, les fongicides et les insecticides représentent à eux seuls près de 85 à 90 % des pesticides commercialisés et consommés dans le monde, tant en volume qu'en chiffre d'affaire (Casida et Bryant, 2017, Toxicol Res). Ils sont très majoritairement utilisés en agriculture pour protéger les cultures (plantes cultivées) et les arbres fruitiers contre les organismes nuisibles et indésirables. 


Usages des pesticides

Les pesticides sont principalement utilisés en agriculture, horticulture et sylviculture pour protéger les plantes cultivées et les cultures contre les organismes nuisibles et indésirables. Mais, les pesticides servent aussi à bien d'autres usages en foresterie, en santé publique (lutte anti-vectorielle), en gestion antiparasitaire (extermination), en milieux urbain, industriel ou domestique. Les raisons de les utiliser peuvent être liées à la santé et au bien-être des humains, à l'hygiène, à la sécurité des infrastructures ou à la protection des matériaux. Les pesticides sont désormais omniprésents dans notre environnement, du champ à la maison, et leur usage massif expose en continu les populations et les écosystèmes à des risques sanitaires et environnementaux.

Dans la législation européenne et française, le terme générique  "pesticides" se divise en deux catégories distinctes : les produits phytopharmaceutiques, utilisés en agriculture pour protéger les cultures, et les biocides, destinés aux usages non agricoles (désinfection, contrôle des nuisibles, protection des matériaux).
À l’inverse, les cadres réglementaires du Canada et des États-Unis emploient principalement le terme unique pesticides (ou produits antiparasitaires au Canada) pour désigner l’ensemble des produits visant à détruire ou contrôler des organismes nuisibles, sans séparer formellement les usages agricoles et non agricoles.
Par ailleurs, les différentes législations distinguent habituellement les pesticides à usage professionnel et les pesticides à usage domestique. Plus concentrés et plus toxiques, les pesticides professionnels nécessitent une formation et une certification pour être appliqués (agriculteurs, exterminateurs). Les produits domestiques, généralement à plus faible risque, peuvent être utilisés par le grand public sans formation ni certification.


Usages agricoles et phytosanitaires

Appelés aussi « produits phytopharmaceutiques » ou « produits phytosanitaires », les pesticides à usage agricole sont utilisés pour protéger les plantes cultivées, les récoltes et les produits agricoles contre les ravageurs, les maladies et les mauvaises herbes, ainsi que pour réguler la croissance des végétaux ou pour faciliter les récoltes.

  • Protection des plantes cultivées, arbres fruitiers, semences et grains, denrées stockées (lutte préventive ou curative) : 
    • contre les ravageurs : insecticides, acaricides, nématicides, rodonticides, phéromones, répulsifs 
    • contre les maladies fongiques, moisissures, bactérioses : fongicides, bactéricides, éliciteurs
  • Élimination des mauvaises herbes ou adventices qui concurrencent les plantes cultivées (herbicides)
  • Régulation de la croissance des végétaux (à l'exception des substances nutritives, engrais ou fertilisants) :
    • lutter contre la verse des céréales;
    • réduire la chute ou le nombre des fruits;
    • provoquer la chute des feuilles (défoliants);
    • inhiber la germination des plantes à bulbes ou des tubercules; 
    • lever la dormance des bourgeons. 
  • Défanage : utilisation d'herbicides pour éliminer des feuilles et éventuellement des tiges aériennes avant récolte, facilitant ainsi la récolte et réduisant le risque de maladies.
  • Déprimage / assèchement pré-récolte : application d’herbicides sur les cultures juste avant la récolte pour accélérer le séchage, uniformiser la maturité et faciliter la récolte mécanique.
  • Désinfection des silos, du matériel agricole et des bâtiments d'élevage pour prévenir la propagation de maladies (fongicides, bactéricides, désinfectants).

L'utilisation d'herbicides pré-récolte (glyphosate, glufosinate) est largement répandue au Canada et aux États-Unis pour assécher les cultures de céréales (blé), de légumineuses (soja, lentilles) et d'oléagineuses (canola), pour défaner les cultures de pommes de terre et de coton, ou pour défolier certaines cultures avant récolte, afin de faciliter la récolte mécanique et uniformiser la maturation. Très controversées, ces pratiques restent en Europe très encadrées, strictement limitées, voire interdites pour les cultures destinées à l’alimentation, afin de réduire les résidus chimiques dans les grains et protéger la santé humaine ainsi que l’environnement.

Les produits phytosanitaires représentent à eux seuls plus de 80 % du marché mondial des pesticides. Ces pesticides sont abondamment employés en agriculture conventionnelle industrielle afin d'assurer la conservation des végétaux et des produits pendant leur production, leur stockage, leur transport ou exportation, de réduire les pertes de récolte, d'augmenter la productivité et de faciliter le travail des agriculteurs. Les grandes monocultures intensives (blé, maïs, riz, soja, coton) consomment à elles seules plus de la moitié des herbicides, fongicides et insecticides commercialisés dans le monde.

Dans le cadre du modèle agricole conventionnel, l'utilisation intensive et préventive dans les cultures d'herbicides, d’insecticides et de fongicides, augmente les risques pour la santé humaine et l'environnement. Souvent persistants et très toxiques, de nombreux pesticides de synthèse et leurs résidus peuvent s'accumuler dans les sols, l'eau, les aliments et dans le corps des animaux et des humains, perturbant ainsi le fonctionnement des écosystèmes naturels, des agrosystèmes et menaçant la santé des humains. Par ailleurs, leur utilisation intensive et répétée induit de plus en plus de phénomènes de résistance chez les organismes cibles, notamment les insectes, les champignons et les adventices, ce qui conduit les agriculteurs à en utiliser davantage et augmente les doses, les coûts et les risques pour leur santé et l'environnement.  

Les pesticides phytosanitaires sont aussi utilisés, mais de façon plus limitée, en foresterie, en horticulture ornementale et entretien paysager ou en gestion de la végétation indésirable dans les milieux non agricoles. 

Foresterie

  • Contrôle de la végétation concurrente : utilisation d’herbicides pour réduire la concurrence des arbustes, fougères, ronces ou feuillus après plantation et aider les jeunes plants forestiers (résineux, feuillus) à bien s’installer.
  • Protection des plants forestiers : fongicides pour protéger les jeunes plants contre certaines maladies (rouilles, fusarioses, etc.).
  • Traitements des semences en pépinière forestière.
  • Lutte contre les insectes forestiers ravageurs : utilisation d’insecticides, parfois en traitement d’arbres isolés ou piégeage/attractifs, parfois en pulvérisation aérienne à grande échelle, par exemple pour lutter contre la spongieuse et la tordeuse du bourgeon de l'épinette au Canada (biopesticide Bacillus thuringiensis).
  • Protection du bois : produits anti-termites et antifongiques sur les grumes ou le bois stocké.
  • Entretien des infrastructures forestières : chemins, pare-feux, pistes d’accès.

Au Canada, moins de 5 % des pesticides utilisés chaque année le sont pour protéger les forêts. L’usage des pesticides se limite habituellement aux forêts privées, aux plantations, pépinières forestières, vergers à graines, boisés de ferme, aux forêts urbaines et souvent en dernier recours dans une gestion intégrée des ennemis de la forêt (insectes, maladies, végétation concurrente). Au Québec, par exemple, seul un insecticide biologique, Bacillus thuringiensis var. kurstaki (Btk), peut être utilisé pour lutter contre les épidémies de la tordeuse des bourgeons de l’épinette, par voie aérienne (Sopfim, Québec)

Horticulture ornementale et entretien paysager  

Des pesticides sont couramment utilisés pour protéger les arbres, les arbustes, les fleurs, et les pelouses à des fins esthétiques. 

  • Parcs et jardins publics
  • Aménagements et alignements d'arbres urbains 
  • Espaces verts et de loisirs
  • Terrains de sports (golf, hippodromes)
  • Cimetières

Gestion de la végétation en milieux non agricoles 

Des herbicides sont couramment utilisés pour désherber et débroussailler les infrastructures afin d'éviter les risques d'incendie ou de dégradations, de protéger la sécurité des usagers ou encore pour conserver leur aspect fonctionnel.
  • Voies ferrées (désherbage des rails)
  • Bords de routes, autoroutes
  • Aéroports
  • Abords et accès des postes, transformateurs, pylônes et lignes électriques
  • Zones industrielles, plateformes logistiques
  • Cours d’eau, canaux, fossés de drainage (espèces envahissantes)

L’usage de ces produits phytosanitaires en ville est très encadré, car ils peuvent être dangereux pour les humains, les animaux et l’environnement urbain. De plus en plus, les municipalités interdisent les pesticides organiques de synthèse et privilégient des méthodes alternatives et écologiques ou des biopesticides. 


Usages sanitaires, domestiques et industriels (biocides)

Les pesticides à usage non phytosanitaire, aussi appelés biocides, sont utilisés pour contrôler les organismes indésirables et nuisibles à la santé humaine, au bien-être des personnes, à l’hygiène, aux animaux, aux bâtiments, aux matériaux et aux produits manufacturés. Ils sont présents dans de nombreux produits domestiques, industriels, médicaux et vétérinaires. Même si certains sont indispensables (désinfectants, lutte contre les vecteurs de maladies), leur omniprésence augmente l’exposition humaine et environnementale, et donc les risques associés.

Les médicaments antifongiques, antibiotiques, antiviraux et vaccins destinés aux humains, ainsi qu’aux animaux lorsqu’ils sont utilisés en interne, ne sont pas considérés comme des pesticides. Leur autorisation relève des agences gouvernementales de santé. De même, les traitements anti-poux destinés aux humains, y compris les shampoings et lotions contenant des insecticides comme les pyréthrinoïdes, relèvent de la réglementation des produits de santé.

 

 Santé humaine

  • Insecticides, acaricides et rodenticides utilisés en santé publique :
    • Lutte contre les vecteurs de maladies humaines (moustiques, tiques, rats, mouches) en zones urbaines, rurales ou à risque épidémique.
    • Pulvérisations ciblées dans les habitations, écoles, bâtiments publics, avions, etc., parfois menées à grande échelle lors d’épidémies.
    • Application de larvicides dans les eaux stagnantes pour réduire les populations de moustiques vecteurs.
    • Prévention de maladies comme le paludisme, la dengue, le chikungunya, la leptospirose, etc.
  •  Produits antiparasitaires corporels (contact direct avec la peau)
    • Shampoings et lotions anti-poux et anti-lentes (produits de santé, parfois contenant insecticides).
    • Lotions et répulsifs anti-moustiques corporels pour prévenir les piqûres d’insectes ou de tiques vecteurs de maladies.
  • Produits antiparasitaires non corporels (environnement domestique) : 
    • Moustiquaires imprégnées d’insecticides pour la protection contre les piqures des moustiques et les mouches vectrices.
    • Housses ou draps imprégnés d'insecticides pour lutter contre les punaises de lits.
    • Produits anti-acariens pour literie, tapis et rideaux, afin de réduire les allergies et l’asthme causés par les acariens des poussières.

Gestion antiparasitaire (extermination)

Lutte préventive et traitements contre les organismes nuisibles et indésirables à l'intérieur ou à l'extérieur des bâtiments et dans les lieux publics :
  • Insecticides, répulsifs, pièges et appâts contre les cafards, les blattes, les fourmis charpentières, les punaises de lit, etc.
  • Insecticides contre les nids de guêpes et de frelons.
  • Rodenticides, répulsifs, pièges et appâts contre les rongeurs (rats, souris).

Usage domestique

Entretien des habitations et résidences :

  • Désherbants pour jardins et allées (usage esthétique, fortement restreint)
  • Savons insecticides pour plantes d'intérieur.
  • Bombes/sprays, pièges et appâts insecticides (anti-moustiques, anti-mouches, anti-fourmis, anti-cafards, anti-guêpes)
  • Pièges, appâts, granulés et blocs rodenticides contre rats et souris
  • Produits contre les mites alimentaires ou textiles (boules anti-mites, pièges attractifs collants, répulsifs)
  • Désinfectants et nettoyants ménagers, produits anti-moisissures pour salle de bain, murs ou joints.

Les pesticides domestiques, généralement peu toxiques ou biopesticides, sont vendus au détail et accessibles au public sans permis ni certification pour un usage résidentiel limité. Les produits plus dangereux nécessitent des professionnels formés et certifiés en gestion antiparasitaire (extermination), surtout dans les zones sensibles (écoles, hôpitaux).

Désinfection et assainissement

  • Désinfectants pour les mains, les surfaces inertes et les environnements sensibles (hôpitaux, écoles, collectivités, industries).
  • Désinfectants pour piscines ou spas (chlore, brome…)
  • Désinfectants pour équipements, installations sanitaires ou dispositifs techniques (climatisations, circuits d’eau, matériels).
  • Produits anti-moisissures pour murs, toitures, façades, salles humides ou surfaces sujettes aux champignons et microalgues.

Usage vétérinaire et santé animale

  • Produits anti-puces, anti-tiques et anti-moustiques pour animaux de compagnie (pipettes, sprays, colliers, shampoings antiparasitaires).
  • Produits zoosanitaires et médicaments topiques pour lutter contre les parasites externes des animaux d’élevage et domestiques
  • Produits d’assainissement pour bâtiments d’élevage : désinfectants, insecticides et assainissants pour étables, bergeries, porcheries, poulaillers, boxes, chenils, etc.
  • Insecticides destinés à la lutte contre les moustiques et autres vecteurs de maladies animales (peste équine, fièvre catarrhale ovine, leishmaniose, etc.).

Protection des matériaux

  • Traitement du bois : produits anti-termites, anti-insectes et anti-champignons pour protéger les charpentes, poutres, menuiseries ou le bois sec.
  • Préservation des matériaux industriels : bois, pâte à papier, fibres textiles, cuir, matériaux polymérisés, ouvrages de maçonnerie, afin de prévenir les attaques d’insectes, de champignons ou de moisissures (insecticides, fongicides, conservateurs).
  • Conservateurs intégrés aux produits manufacturés : ajout de biocides dans les colles, peintures, enduits, mastics, revêtements, détergents ou fluides industriels pour empêcher le développement de microbes, algues ou champignons.
  • Traitement des peintures et enduits : additifs pour éviter l’apparition d’algues, mousses, lichens ou moisissures sur les surfaces extérieures.
  • Peintures antisalissures (antifouling) : protections appliquées sur les coques de bateaux, bouées, pontons et structures marines pour limiter l’adhésion d’algues, micro-organismes et coquillages.

Formulations et homologation

Une préparation commerciale (formulation) de pesticide est composée de deux principaux éléments :
  • une ou plusieurs matières actives responsables de l’effet biologique contre le ou les organismes indésirables visés. Celles-ci peuvent être :
    • des substances minérales (soufre, sulfate de cuivre)
    • des substances biologiques (poudre de pyrèthre, huile de neem)
    • des substances synthétiques (carbamates, triazines), dans la majorité des pesticides
    • des microorganismes vivants antagonistes ou agents microbiens (bactéries, champignons, virus).
  • des adjuvants ou co-formulants plus ou moins inertes qui facilitent son utilisation, sa conservation ou augmentent son efficacité et sa stabilité. Ceux-ci peuvent être des stabilisateurs, des agents tensioactifs (surfactants), des solvants (alcool, éthers), des émulsionnants, des mouillants, des photoprotecteurs, des colorants, des vomitif ou encore des synergistes, etc. Bien que les adjuvants n’exercent aucune action pesticide, ils peuvent être nocifs pour la santé humaine ou l’environnement (Mesnage R, Biomedical Research International 2014).
Il est à noter que les formulations contiennent parfois des impuretés de fabrication qui peuvent interagir avec la matière active.

Crédit photo : licence Domaine public via Wikimedia Commons

En 2015, Monsanto le producteur de l'herbicide Lasso, dont l'ingrédient actif est l'alachlore, a été condamné par la justice française pour l'intoxication d'un agriculteur en 2004 (LeMonde.fr, 10.09.2015). C'est la première fois qu'un fabricant de pesticides était condamné pour avoir intoxiqué un agriculteur. Ce dernier s'était intoxiqué en 2004 en inhalant des vapeurs de monochlorobenzène, un solvant hautement toxique; il souffre depuis de graves troubles neurologiques. Il est à noter que le Lasso est interdit au Canada depuis 1985 et en France depuis seulement 2007.

Les pesticides peuvent être préparés, conditionnés et appliqués sous différentes formes :
  • Solides à disperser ou à dissoudre (granulés, poudres solubles ou mouillables, poudres prêtes à l’emploi, pastilles et comprimés, appâts, gels de contact, engrais imprégnés, semences enrobées, microcapsules de polymères, etc).
  • Liquides à pulvériser (solutions aqueuses, bouillies, suspensions et émulsions concentrées, aérosols)
  • Gaz à diffuser dans des espaces clos ou dans le sol (fumigènes, fumigants)

Peu utilisé en Europe, l'épandage aérien de pesticides sur les cultures et les forêts par avion ou hélicoptère est très répandu en Amérique du Nord et du Sud. Le premier épandage aérien a été réalisé aux États-Unis en 1931 avec de l'arséniate de plomb, un fongicide et insecticide hautement toxique et désormais interdit.
Crédit photo : Gerald Holmes, California Polytechnic State University at San Luis Obispo, Bugwood.org, licence CC BY-NC 3.0

Processus d'homologation

Il existe plusieurs centaines de matières actives qui entrent dans la composition de plusieurs dizaines milliers de préparations et formulations commerciales. Chaque produit ou préparation doit être évalué pour son efficacité et ses risques pour la santé humaine et l’environnement et autorisé avant commercialisation par une agence gouvernementale.

Longs et complexes, les processus d’homologation des pesticides reposent sur l’examen détaillé de de plusieurs données :

  • l’activité biologique et agronomique
    • efficacité sur la culture et intérêt agronomique
    • doses et modes d’application
    • incidences sociales et économiques
  • les propriétés toxicologiques (effets sur la santé humaine)
    • toxicité aiguë à court terme
    • toxicité à long terme (effets sur la reproduction et le développement, sur les systèmes immunitaire et endocrinien, cancérogénécité, mutagénécité, etc.)
    • Analyse des résidus dans les aliments
  • les propriétés écotoxicologiques (effets sur l'environnement) :
    • dégradation, mobilité et devenir dans l’environnement
    • effets sur les espèces terrestres (lombrics, abeilles, plantes) et aquatiques non visées
Ils visent à s'assurer que les pesticides présentent un risque acceptable pour les populations humaines et animales et l'environnement.

Les autorisations de mise sur le marché sont délivrées pour un usage précis (cultures hôtes et organismes cibles) et pour des conditions d'emploi très strictes (doses et modes d'application, période de traitement avant la récolte, etc.). Selon les pays et les législations en vigueur, il peut exister plusieurs catégories d’usage :
  • usage agricole, horticole ou forestier (phytosanitaire)
  • usage commercial, industriel ou institutionnel (biocides)
  • usage domestique (spécifiquement conçus pour les habitations et les jardins, ils sont moins concentrés et commercialisés en petit format)
  • usage médical ou vétérinaire


Un même ingrédient actif peut être utilisé pour différents usages mais il doit être évalué pour chacun de ses usages. Certains pesticides peuvent en outre servir de médicaments à condition d'être soumis à une procédure d'homologation distincte. Les médicaments, les antibiotiques et les vaccins destinés aux humains et aux animaux ne sont pas considérés comme des pesticides. Certains d'entre eux comme les lotions anti-poux, les produits anti-tiques ou les vermifuges contiennent des molécules pesticides. Par ailleurs, sauf exceptions, les antibiotiques ne sont généralement pas autorisés en phytoprotection (voir Bactéricides).

Il est interdit de commercialiser ou d’employer un pesticide ou une formulation qui n’a pas été autorisé ou homologué. Chaque spécialité commerciale homologuée doit porter une étiquette qui indique clairement les usages autorisés, les modes de préparation et d'application, les précautions d'emploi, les conditions de stockage, les conseils de prudence et la toxicité.   

Des procédures d'homologation contestées...
Les procédures d'homologations sont l’objet de polémiques en particulier parce qu’elles sont basées uniquement sur les expérimentations normalisées de l’industrie agrochimique sans prendre en compte les recherches indépendantes et universitaires. De plus, chaque pesticide est testé individuellement et non en synergie avec d’autres substances pesticides avec lesquelles il peut interagir en plein champ ou dans l'environnement; les effets chroniques non intentionnels sont en effet souvent le résultat de l’action synergique de plusieurs molécules, résidus ou métabolites. De nombreux chercheurs, scientifiques et organisations non gouvernementales dénoncent le manque de transparence des agences de réglementation et leur dépendance aux données des fabricants et de l'industrie agrochimique qui exerce un important lobbying (Vigilance OGM Québec, site des failles de l'évaluation des pesticides).

 

Origines chimiques, biologiques et types (matières actives)

Dans son compendium, Alan Wood recense plus de 1800 matières actives ou molécules pesticides. Selon leur origine et leur structure, on distingue habituellement les pesticides inorganiques, composés d’éléments minéraux (métaux, sels, oxydes, sulfates, etc.) et les pesticides organiques dont la structure chimique comprend des chaînes carbonées (liaisons Carbone - Hydrogène). Ils peuvent être naturels ou synthétiques. 

Par commodité, on distingue donc trois grands groupes de matières actives chimiques :

  • Pesticides inorganiques ou minéraux (d'origine naturelle ou synthétique)
  • Pesticides organiques naturels ou biochimiques (d’origine végétale, microbienne ou animale)
  • Pesticides organiques de synthèse (molécules conçues ou modifiées par l’industrie chimique)

On distingue aussi les pesticides microbiens dont la matière active n'est pas une molécule, mais un microorganisme vivant (champignons, bactéries, virus). Ces produits sont utilisés pour le contrôle biologique des ravageurs et maladies (lutte biologique ou microbiologique).

Selon les législations et règlementations, les pesticides microbiens sont considérés comme des biopesticides ou produits de biocontrôle. De manière générale, les biopesticides comprennent :
  • les pesticides microbiens qui contiennent des microorganismes vivants (champignons, bactéries, virus) et sont des parasites ou antagonistes des agents phytopathogènes;
  • les phéromones et autres médiateurs chimiques naturels (sémiochimiques) qui interviennent dans la communication chimique entre individus d'une même espèce ou d'autres espèces;
  • et les substances naturelles d’origine animale, végétale, microbienne ou minérale (extraits végétaux, métabolites bactériens, huile minérale, etc.) qui protègent les plantes contre les maladies et ravageurs ou stimulent leurs défenses naturelles.

Pour en savoir plus sur les biopesticides autorisés et utilisés en Europe et Amérique du Nord :  


Pesticides inorganiques (minéraux)

Les pesticides inorganiques sont des produits dont la structure chimique ne comprend généralement pas de chaînes carbonées C-H (à l'exception des huiles minérales). Ce sont essentiellement des composés minéraux à base de soufre, de cuivre, de bore, de fer, de silicium, ou d'autres éléments présents naturellement dans la lithosphère et les sols. Il peut s’agir d’éléments natifs (par exemple, le soufre), de sels minéraux (sulfates, sulfures, oxydes, arséniates, borates, silicates, phosphates, carbonates), ou de composés synthétisés industriellement à partir de précurseurs inorganiques. 

Très utilisés aux XIXᵉ et XXᵉ siècles, les pesticides minéraux occupent aujourd’hui une place plus restreinte, à l’exception notable du soufre et du cuivre, toujours essentiels comme fongicides en agriculture, notamment en viticulture et en arboriculture.

Les pesticides minéraux comptent parmi les plus anciens pesticides utilisés par l’humanité. Le soufre est employé comme insecticide depuis l’Antiquité, tandis que les composés de l’arsenic, du mercure et du cuivre ont été largement utilisés du XIXᵉ siècle au milieu du XXᵉ siècle, dès le début de l'agriculture moderne. L’usage massif des arséniates de plomb, des sels de mercure et des sels de cuivre a entraîné une accumulation durable de métaux lourds (non biodégradables) dans les sols et les eaux. En raison de leur forte toxicité, de leur persistance et de leur impact environnemental, les pesticides à base d’arsenic et de mercure sont aujourd’hui interdits dans la plupart des pays.

Principaux pesticides inorganiques encore utilisés de nos jours

Composés du soufre [S]

  • Soufre minéral élémentaire : fongicide, insecticide/acaricide, répulsif
  • Chaux soufrée (polysulfures de calcium) : fongicide, insecticide

 Composés du cuivre [Cu]

  • Bouillie bordelaise (sulfate de cuivre [CuSo4] + chaux [Ca(OH)2]) : fongicide, bactéricide
  • Hydroxyde de cuivre [Cu(OH)₂)] : fongicide, bactéricide
  • Oxychlorure de cuivre [Cu2Cl(OH)3] : fongicide, bactéricide
  • Oxyde cuivreux (cuprite) [Cu2O] : biocide anti-fongique, antifouling 

 Composés du bore [B]

  • Borax / tétraborate de sodium [Na2B4O7•10H2O] : insecticide
  • Acide borique [B(OH3)] : antiseptique, insecticide et fongicide

 Composés du fer [Fe]

  •  Phosphate ferrique [FePO4] : molluscicide (anti-limaces)
  •  Sulfate de fer [FeSo4] : anti-mousse, engrais verdissant

Composés du Silicium [Si]

  • Dioxyde de silicium (terre de diatomées) [SiO2] : insecticide, piège, molluscicide (anti-limaces)
  • Kaolin (argile blanche) / silicates d'aluminium [Al2SiO5]  : insecticide de contact (barrière physique)
  • Gel de silice : insecticide (déshydratant) 

Composés halogénés simples

  • Bicarbonates de soude [NaHCOO3] ou de potassium [KHCOO3] : fongicides, insecticides
  • Chlorure de sodium ou sel de cuisine [NaCl] : herbicide desséchant
  • Chlorate de sodium : herbicide racinaire, oxydant (explosif)

Composés du phosphore (P)

  • Phosphonates (phosphites) de potassium [K2HPO3] ou de sodium (Na2HPO3) : fongicides, phytostimulants
  • Phosphine ou hydrure de phosphore [PH3] : gaz fumigant insecticide, rodenticide
  • Phosphure d’aluminium [AlP], de magnésium [Mg3P2] ou de zinc [Zn3P2] : précurseurs de la phosphine au contact de l'eau 

Composés du carbone [C] 

  • Huiles minérales horticoles ou huiles blanches [CnH2n+2] (paraffines): insecticides/acaricides de contact, parfois fongicides
  • Dioxyde de carbone ou gaz carbonique [CO2] : fumigant insecticide (gaz asphyxiant)

Les huiles minérales ne sont pas réellement minérales au sens chimique. Ce sont des hydrocarbures (CH,  donc organique), extraites du pétrole brut ou de la houille, donc de sources géologiques minérales, et non de plantes ou d’animaux. Historiquement, on les a appelées minérales pour les distinguer des huiles végétales ou animales. Leur usage en horticulture comme insecticide de contact les rapproche des produits minéraux. Le dioxyde de carbone est présent naturellement dans l’atmosphère et est à l'origine de l'effet de serre. 

Pesticides minéraux à faible impact ou biopesticides minéraux

Plusieurs matières actives minérales sont des composés d'origine naturelle ou à faible impact, peu persistants, peu toxiques, avec un mode d’action souvent physique ou non spécifique. Ils sont habituellement considérés comme des biopesticides ou produits de biocontrôle selon les règlementations. Certains sont même autorisés en agriculture biologique.

Parmi les substances minérales désignées comme des biopesticides les plus utilisées, on trouve principalement : 

  • des fongicides minéraux : soufre minéral, chaux soufrée, sulfate de cuivre, bicarbonates
  • des insecticides minéraux : borate et acide borique, gel de silice et dioxyde de silicium ou terre de diatomée, soufre, kaolin, huiles paraffiniques hautement raffinées
  • des molluliscides anti limaces : phosphate ferrique, terre de diatomées 

Les composés du cuivre dont la bouillie bordelaise sont habituellement autorisés en agriculture biologique comme fongicides ou bactéricides, mais leur usage est strictement encadré en raison de leur impact environnemental : le cuivre est non biodégradable et s'accumule dans les sols à des concentrations toxiques pour les organismes bénéfiques. Les produits cuivriques doivent être utilisés de façon raisonnée, en dernier recours seulement. En Europe, la réglementation impose une quantité maximale de cuivre métallique par hectare et par an

Pesticides minéraux dangereux 

Certains composés minéraux très toxiques ou dangereux sont encore utilisés dans des contextes très restreints, notamment pour la fumigation des grains et denrée stockées dans les silos : phosphine et phosphures, dioxyde de carbone. D'autres fumigants à large spectre insecticides/rodenticides/nématicides très toxiques comme le cyanogène ou le disulfure de carbone très longtemps utilisés sont désormais interdits ou abandonnés. L’usage du chlorate de sodium comme herbicide racinaire est aujourd’hui largement interdit ou abandonné en raison de sa forte toxicité, de son impact environnemental et de ses propriétés d’oxydant puissant pouvant présenter des risques d’incendie ou d’explosion.

Organométalliques 

Parmi les pesticides inorganiques, on trouve aussi des complexes organométalliques qui associent par chélation un ligand organique comme l'EDTA à un cation métallique comme le cuivre ou le fer. Le chélateur ne possède pas de propriétés pesticides mais favorise seulement l'absorption de l'élément métallique par la plante. 

Par ailleurs, plusieurs pesticides organiques de synthèse possèdent au sein de leur structure chimique des éléments métalliques comme le cuivre, le zinc ou l'étain qui contribuent à leur activité biocide.


Pesticides organiques naturels (biochimiques)

Les pesticides organiques naturels, appelés aussi « pesticides biochimiques », regroupent des substances d’origine végétale, animale ou microbienne. Il s’agit de molécules naturelles extraites, purifiées ou produite par fermentation, ou encore d'extraits, d'huiles essentielles, d'huiles, de savons, de farines, de purins, etc. 

Ils comprennent principalement des molécules ou des extraits qui protègent les végétaux contre les maladies et ravageurs, stimulent leur défenses naturelles ou modifient le comportement des ravageurs.

  • des extraits de plantes : farine de gluten de maïs, purins (ortie, ail), huiles essentielles, huiles végétales, huile de neem, saponines, etc.
  • des insecticides phytochimiques : pyréthrines, nicotine, ryanodine, roténone, quassine, etc.
  • des toxines ou métabolites bactériens : toxines de Bacillus thuringiensis (Bt), avermectines, spinosynes, polyoxines, etc.
  • des produits de fermentation : acides citrique et lactique, 
  • des acides gras ou savons insecticides ou herbicides d'origine animale ou végétale 
  • des molécules sémiochimiques ou médiateurs chimiques : phéromones d’insectes, kairomones (elles sont souvent synthétisées industriellement pour des raisons pratiques).
  • des stimulateurs des défenses naturelles des plantes (SDP/SDN) : laminarine, chitosane, harpine, etc..

Substances d'origine végétale (pesticides botaniques ou phytochimiques) 

  • Insecticides naturels ou phytochimiques
    • Pyréthrines naturelles insecticides, poudre de fleurs de pyrèthre (Chrysanthemum cinerariifolium)
    • Alcaloïdes insecticides : 
      • Nicotine (Nicotianna tabacum)
      • Roténone (racines de Derris, Lonchocarpus)
      • Ryanodine (Ryania speciosa)
    • Azadirachtine (graines de neem/margousier Azadirachta indica), insecticide et régulateur de croissance
  • Terpènes et monoterpènes  (huiles essentielles, effets insecticides, fongicides, acaricides ou répulsifs 
    • d-Limonène (écorce d’agrumes)
    • Citronellal, citronellol, géraniol (géranium, citronnelle)
    • Eugénol (clou de girofle) 
    • Thymol, carvacrol (thym, origan)
    • Menthol (menthe)
    • Eucalyptol (1,8-cinéole) (eucalyptus)
    • Etc.  
  • Autres composés végétaux
    • Saponines (quinoa, lierre, yucca) : insecticide et/ou fongicide
    • Acide nonanoïque / pélargonique (géranium) : herbicide (savons)
    • Acide caprylique / octanoïque (noix de coco, huile de palme) : herbicide, 
    • Acide acétique (vinaigre) : herbicide
    • Gluten de maïs (farine) : herbicide 
    • Capsaïcine (piment) : insecticide, répulsif mammifères et insectes
    • Extraits / poudre d'ail : fongicide, répulsif
    • Lécithine de soja : fongicide anti-mildiou 
    • Maltodextrine (glucide dérivé de l'amidon) : insecticide asphixiant
    • Huile de neem (margousier) : insecticide, insectifuge, acaricide, fongicide, biostimulant
    • Huiles végétales horticoles (colza, coton, soja) : insecticides / acaricides
    • Huile de ricin : répulsif taupes et rongeurs
    • Laminarine (extrait d’algues brunes) : activateur de défense

Substances d'origine microbienne (métabolites ou toxines purifiées)

  • Toxines insecticides de Bacillus turingiensis (Bt) : protéines Cry, Cyt, Vip
  • Lactones macrocycliques produites par des bactéries du sol :
    • Streptomyces avermitilis : Avermectines (abamectine, ivermectine)*, Milbémycines*
    • Saccharopolyspora spinosa : Spinosides (Spinosad)
  • Autres métabolites, produits de fermentation :
    • Polyoxines (nucléosides peptidiques de Streptomyces cacaoi) : fongicides 
    • Harpine (protéine d’Erwinia amylovora) : stimulateur de défenses naturelles des plantes (SDN) 
    • Acides lactique et citrique (fermentation de Lactobacillus casei) : fongicides, bactéricides, algicides
    • Cerevisane (parois cellulaires de levure Saccharomyces cerevisiae) : fongicide, stimulateur de défenses naturelles des plantes (SDN)

Substances d'origine animale ou autre

  • Phéromones sexuelles d'insectes (principalement des Lépidoptères) : lutte biologique par confusion sexuelle, pièges, répulsifs. Pour des raisons pratiques de disponibilités, elles sont souvent synthétisées à l'identique à partir de produits de la chimie industrielle. 
  • Chitosane (exosquelettes de crustacés) : fongicide et stimulateur de défenses des plantes (SDP)
  • Laminarine (extrait d’algue brune) : stimulateur de défenses des plantes
  • Graisse de mouton : répulsifs cervidés 
  • Poudre de sang séché : répulsifs écureuils, lapins, ratons
  • Acide formique (fourmis, abeilles, orties) : acaricide (traitement du varroa)
  • Venins et peptides toxiques (abeilles, serpents, araignées) : insecticides à l'étude

À l’exception de certains alcaloïdes insecticides (nicotine, roténone, ryanodine), la plupart des pesticides biochimiques listés ci-dessus sont classés dans les réglementations comme des biopesticides ou produits de biocontrôle. Ils sont soumis à l’homologation par les autorités compétentes et, pour une grande partie d’entre eux, autorisés en production biologique, sous réserve que la formulation complète (et non seulement la substance active) soit conforme au cahier des charges de l'agriculture biologique. Attention : tous les biopesticides ne sont pas automatiquement autorisés en agriculture biologique. Même s’ils sont d’origine naturelle, leur utilisation doit respecter le cahier des charges de l’agriculture biologique, qui impose :
  • l’absence de substances toxiques ou trop purifiées;
  • des procédés de fabrication et formulations conformes (pas de adjuvants non autorisés ou toxiques);
  • et l’inscription du produit sur les listes positives officielles (UE, Canada, NOP/USDA).

Facilement biodégradables et peu rémanent, les pesticides biochimiques ont un impact faible sur l'environnement à court terme et, pour la plupart, une toxicité aiguë limitée. De fait, plusieurs d'entre sont autorisés en agriculture biologique qui exclut les intrants chimiques de synthèse. Toutefois, certains de ces pesticides naturels peuvent être très toxiques à court terme pour les organismes non visés y compris les abeilles, les auxiliaires de la lutte biologique et les humains (par exemple, les alcaloïdes insecticides). Lorsqu'ils sont purifiés, certains peuvent aussi induire des résistances chez les populations de ravageurs ou de pathogènes. 

Les plantes synthétisent naturellement de nombreux métabolites secondaires (alcaloïdes, flavonoïdes, terpénoïdes, saponines, etc.) jouant un rôle essentiel dans leur défense contre les ravageurs et les maladies, ainsi que dans leurs interactions compétitives avec d’autres plantes. Les composés les plus actifs sont extraits, isolés, purifiés et formulés pour devenir des produits commerciaux, soumis aux mêmes processus d’homologation que les pesticides de synthèse.

Par ailleurs, certaines molécules naturelles ont principalement un effet d’induction de défense ou de stimulation physiologique chez les plantes. Certaines d’entre elles comme la laminarine, la harpine ou le chitosane sont homologuées comme pesticides biopesticides dans plusieurs pays, car leur action confère une protection contre les maladies. D’autres éliciteurs naturels aux effets plus généraux sur la croissance ou la vigueur des plantes (jasmonates, BABA, extraits d’algues, brassinostéroïdes) sont plutôt classées comme biostimulants ou biofertilisants.

Extraits végétaux bruts (purins, décoctions, infusions)

Les purins, décoctions, macérations et infusions de diverses plantes (ail, ortie, prêle, fougère, consoude, sauge, tagètes, etc.) sont utilisés pour leurs effets potentiels insecticides, fongicides, répulsifs ou herbicides. Bien que généralement moins efficaces que les principes actifs isolés et purifiés, ils présentent certains atouts : 
  • enrichissement du sol en oligoéléments, stimulation de la microflore du sol;
  • amélioration de la santé et de la croissance des plantes et stimulation de leurs défenses naturelles contre maladies et ravageurs;
  • réduction des risques de résistances (effets et modes d'action multiples) chez les populations de ravageurs ciblés.  
 Principaux extraits bruts utilisés :
  • Purin d'ortie comme stimulant, fongicide et répulsif
  • Purin de fougères comme insecticide et insectifuge
  • Décoction et purin de prêle comme fongicide
  • Décoctions et infusions d'ail comme fongicides, insecticides et insectifuges

➤ Pour avoir en savoir plus sur les principaux extraits végétaux bruts et la façon de les préparer, consulter l'article "Alternatives aux pesticides de synthèse : les extraits végétaux" (PestInfos, 2020)

Les extraits végétaux bruts commercialisés sont classés comme préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP) ou biostimulants, avec des procédures d’enregistrement simplifiées et sont destinés à des usages domestiques. Ils peuvent aussi être obtenus artisanalement selon différentes recettes traditionnelles et être utilisés pour ses propres besoins, à l'échelle d'un jardin. Attention, les effets allégués de certaines recettes traditionnelles sont variables et ne sont pas toujours corroborés par les études scientifiques.

Autre préparation artisanale d'intérêt en permaculture, le thé de compost est obtenu par infusion d'un compost en le laissant tremper dans de l'eau oxygénée. En plus de stimuler la flore microbienne du sol, le thé de compost améliore la santé des plantes d'intérieur ou du jardin et renforcent leur défenses naturelles contre les maladies fongiques (Rustica, 2023). 


Pesticides microbiens (biopesticides)

Les pesticides microbiens sont des pesticides contenant des microorganismes vivants comme des bactéries, des champignons, des virus, des protozoaires, etc. et/ou leurs métabolites ou toxines. Leur efficacité repose sur leur activité biologique, leur parasitisme ou antagonisme, leur  compétition avec les organismes nuisibles ciblés, leur productions de métabolites ou toxines.

Voici les principaux microorganismes utilisés présentement en lutte biologique pour contrôler les ravageurs et les maladies des plantes.  

Bactéries entomopathogènes (bioinsecticides)

  • Bacillus thuringiensis (var, kurstaki, aizawai, israelensis, tenebrionis)
  • Chromobacterium subtsugae

Bactéries antagonistes / fongicides

  • Bacillus subtilis
  • Bacillus amyloliquefaciens
  • Streptomyces lydicus

Champignons antagonistes (biofongicides)

  • Trichoderma harzianum, T. atroviride
  • Coniothyrium minitans
  • Pythium oligandrum

Champignons entomopathogènes (bioinsecticides)

  • Beauveria bassiana
  • Metarhizium anisopliae / M. brunneum

Virus entomopathogènes ou entomovirus (baculovirus)

  • CpGV (granulovirus du carpocapse Cydia pomonella)
  • Divers NPV spécifiques de chenilles

➤ Pour en savoir plus sur les biopesticides microbiens, consultez la page Microorganismes auxiliaires (lutte microbiologique)

Les microorganismes sont multipliés par des procédés industriels, le plus souvent sur des milieux artificiels, en fermenteurs (bactéries et champignons), et sont conditionnés sous forme de granulés, de poudres mouillables ou de suspensions à pulvériser par les méthodes conventionnelles dans les cultures, jardins, parc, forêts ou milieux humides, selon les cas. Des adjuvants peuvent être ajoutés au besoin pour accroître leur persistance dans l’environnement ou leur adhésion au feuillage. Comme pour les autres pesticides, leur commercialisation et utilisation sont soumises aux règlementations et à l'homologation des autorités sanitaires. Plusieurs d'entre eux peuvent être autorisés en agriculture biologique selon que leurs formulations commerciales respectent ou non les normes en vigueur.

Les macroorganismes vivants utilisés comme auxiliaires de la lutte biologique (insectes prédateurs ou parasitoïdes) ne sont généralement pas classés comme pesticides ou biopesticides au sens réglementaire, mais leur usage (importation, lâcher) est réglementé via un cadre spécifique, notamment lorsqu'ils ne sont pas indigènes. En lutte biologique, d'un point de vue scientifique ou pratique, ces agents de lutte biologique sont néanmoins considérés comme des biopesticides. ➤ Consulter ma page Lutte biologique et biopesticides


Pesticides organiques de synthèse (chimiques)

Les pesticides organiques de synthèse, qui sont communément nommés « pesticides chimiques » parce qu’ils sont issus de la chimie industrielle et par opposition aux « pesticides biologiques », sont les plus nombreux et les plus utilisés actuellement, notamment en agriculture; ils représentent plus de 90 % des pesticides commercialisés. Depuis la seconde moitié du 20ème siècle, ils sont massivement employés en agriculture où la lutte chimique constitue la principale méthode de protection des cultures et des denrées.

Issus des gaz de combat, les premiers pesticides de synthèse sont des neurotoxiques apparus après la Première Guerre mondiale. Leur usage en agriculture et en lutte antivectorielle se généralise à partir des années 1960, dans le contexte de la seconde révolution verte et du développement d’une agriculture productiviste et chimique, fondée principalement sur l’emploi d’intrants (engrais, pesticides) et le travail mécanique des sols.
Si les pesticides ont contribué à faciliter le travail des agriculteurs et à répondre aux besoins alimentaires des populations au sortir de la guerre, en favorisant l’augmentation des rendements agricoles et l’amélioration des conditions sanitaires, leur utilisation massive et souvent non raisonnée s’est rapidement révélée dangereuse, tant pour l’environnement (pollutions, perte de biodiversité) que pour les agrosystèmes (dégradation de la fertilité des sols) et pour la santé humaine, touchant en premier lieu les agriculteurs, mais aussi les populations rurales et l’ensemble de la société.

Les matières actives de ces pesticides sont produites artificiellement par synthèse à l’aide de réactions chimiques à partir de précurseurs pétrochimiques ou par hémisynthèse en modifiant chimiquement la structure de molécules naturelles. Ces molécules organiques généralement complexes sont le fruit de longues études et recherches de développement qui font appel au criblage au hasard (screening tests), à l'étude des relations structure-activité ou, de plus en plus souvent, au design moléculaire qui cible un site d'action moléculaire spécifique.

Principales familles chimiques

Il existe un très grand nombre de matières actives aux propriétés pesticides. Très diversifiées, elles sont classées en plus de 150 familles chimiques différentes selon leur structure chimique et leur activité biologique. Chaque famille correspond à un ensemble de molécules partageant une même structure chimique (c’est-à-dire une organisation similaire des atomes et des groupes fonctionnels) et présentant en général un mode d’action comparable ainsi que des caractéristiques physicochimiques et toxicologiques proches. 

Parmi les familles chimiques les plus représentées, on peut distinguer :

Insecticides
  • Organochlorés (DDT, lindane, chlordécone), premiers insecticides de synthèse à large spectre
  • Organophosphorés (malathion, clorpyrifos, diazinon), issus de la chimie des gaz de combat (neurotoxiques)
  • Carbamates (aldicarbe, carbaryl, méthomyl),
  • Pyréthrinoïdes, dérivés des pyréthrines naturelles (perméthrine, deltaméthrine, cyperméthrine) 
  • Néonicotinoïdes, dérivés analogues de la nicotine (imidacloprine, chlothianidine, thiaméthoxame), premiers insecticides systémiques majeurs
  • Phénylpyrazoles (fipronil)
  • Oxadiazines (indoxacarbe)
  • Diamides / anthranilamides (chlorantraniliprole, cyantraniliprole)
  • Sulfoximines (sulfoxaflor)
  • Benzoylurées (diflubenzuron, téflubenzuron), régulateurs de croissance
Herbicides
  • Acides phénoxyacétiques (2,4-D, 2,4,5-T), premiers herbicides sélectifs
  • Urées substituées (chlortoluron, diuron, isoproturon)
  • Triazines (atrazine, simazine, cyanazine)
  • Bipyridines / ammoniums quaternaires à noyau bipyridiniques (diquat, paraquat)
  • Dinitroanilines (trifluraline, pendiméthaline)
  • Chloroacétamides (alachlore, métolachlore, acétochlore)
  • Herbicides analogues ou dérivés d’acides aminés naturels :
    • Glyphosate (aminophosphonate), dérivé de la glycine
    • Glufosinate (phosphinate), analogue du glutamate 
  • Imidazolinones (imazapyr, imazamox, imazethapyr)
  • Sulfonylurées (chlorsulfuron, flazasulfuron)
Fongicides
  • Organochlorés / nitriles aromatiques (chlorothalonil, pentachlorophénol)
  • Dithiocarbamates (zinèbe, manèbe, mancozèbe, thirame)
  • Benzimidazoles (bénomyl, carbendazime), premiers fongicides systémiques
  • Phénylamides (bénalaxyl, métalaxyl)
  • Imidazoles (prochloraz, imazalil, clotrimazole)
  • Triazoles (tebuconazole, diniconazole, épiconazole)
  • Morpholines (fenpropimorphe, dodemorphe)
  • Strobilurines, dérivés de métabolites fongiques naturels (azoxystrobine, fluoxastrobine, pyrachlostrobine)
  • Anilides/crotoanilides (boscalid, fluazinam)
  • Carboxamides (bixafen, isopyrazam, fluxapyroxad), premiers fongicides SDHI

 Autres :

  • Formamidines (amitraz) : acaricides
  • tétrázines/dérivés de la thiazolidinone Tétrazones et dérivés (clofentézine, hexythiazox) : acacaricides, ovicide et larvicide ciblée
  • Avermectines synthétiques (lactones macrocycliques synthétiques, dérivés de métabolites fongiques (émamectine benzoate, oxime de milbémycine) : acaricides, nématicides vétérinaires
  • Fumigants halogénés (bromure de méthyle, dichloropropène) : nématicides
  • Aldéhydes (métaldéhyde) : mollusicides anti-limaces
  • Anticoagulants coumariniques / hydroxycoumarines synthétiques (bromadiolone, brodifacoum, difenacoum) : rodenticides

Diversité des cibles et des modes d’action

Une même famille chimique peut regrouper des substances dont les organismes cibles et parfois les modes d’action diffèrent. Par exemple, les carbamates comprennent à la fois des insecticides, des herbicides et des fongicides. Inversement, certaines matières actives présentent plusieurs cibles biologiques et peuvent être utilisées contre différents organismes nuisibles : il s’agit alors de pesticides à large spectre.

Les pesticides organiques de synthèse se caractérisent généralement par une action spécifique, ciblant un site d’action moléculaire précis. Ils sont donc fréquemment classés selon leur mode d’action.

Classement des principales familles selon leur mode d'action 

Insecticides

  • Insecticides neurotoxiques : 
    • Modulateurs des canaux sodiques : organochlorés, pyréthrinoïdes
    • Inhibiteurs de l’acétylcholinestérase : organophosphorés, carbamates
    • Agonistes des récepteurs nicotiniques : néonicotinoïdes, sulfoximines
    • Modulateurs des canaux calciques (récepteurs à la ryanodine) : diamides
  • Insecticides régulateurs de croissance :
    • Inhibiteurs de la synthèse de la chitine : benzoylurées, buprofézine
    • Analogues et mimétiques synthétiques des hormones juvéniles : méthoprène, pyriproxifène, fénoxycarbe
    • Agonistes de l’ecdysone : benzhydrazides ou diacylhydrazines (tébufénozide, métoxyfénozide) 

Herbicides

  • Phytohormones de synthèse / herbicides auxiniques : acides phénoxyacétiques
  • Inhibiteurs de la photosynthèse : triazines, urées substituées, bipyridines
  • Inhibiteurs de la biosynthèse d’acides aminés : glyphosate, sulonylurées, imidazolinones
  • Inhibiteurs de la biosynthèse des lipides : chloroacétamides

Fongicides

  • Fongicides multisites : dithiocarbamates
  • Inhibiteurs de la dision cellulaire  : benzimidazoles, phénylcarbamates
  • Inhibiteurs de la respiration mitochondriale : strobilurines
  • Inhibiteurs de la synthèse des stérols (IBS) : triazoles, imidazoles, morpholines
  • Inhibiteurs de la succinate déshydrogénase (SDHI) : anilides, carboxamides
  • Inhibiteurs de la biosynthèse des ARN ribosomaux : phénylamides

Pesticides de contact et pesticides systémiques

On distingue classiquement les pesticides de contact, principalement utilisés dans les premières générations de molécules et agissant à la surface des organismes ou des végétaux traités, et les pesticides systémiques, capables de pénétrer dans la plante et d’être véhiculés via la sève, assurant ainsi une protection interne des tissus végétaux.

Si les pesticides systémiques présentent l’avantage d’une efficacité prolongée et d’une protection interne des plantes, leur utilisation, notamment par pulvérisation foliaire ou par enrobage de semences, soulève d’importantes préoccupations. En se diffusant dans l’ensemble du végétal, y compris les fruits, les grains ou les tubercules, ces substances peuvent persister sous forme de résidus ou de traces dans les denrées agricoles, exposant ainsi les consommateurs à des risques potentiels pour la santé humaine. Par ailleurs, leur persistance et leur mobilité dans l’environnement favorisent la contamination des sols et des eaux, ainsi que l’exposition d’organismes non ciblés, en particulier les pollinisateurs tels que les abeilles, pour lesquels des effets délétères ont été largement documentés, notamment dans le cas des insecticides systémiques. Leur usage diffuse rend également difficile le contrôle ciblé des nuisibles.

Pesticides organométalliques

Plusieurs pesticides de synthèse sont des composés organométalliques, caractérisés par la présence d’une liaison entre un atome de carbone d’un groupement organique et un élément métallique inorganique, tel que l’étain, le cuivre ou le zinc. La présence du métal confère à ces substances une efficacité accrue et une stabilité chimique élevée. En revanche, ces propriétés s’accompagnent souvent d’une toxicité importante, d’une forte persistance environnementale et d’un potentiel polluant élevé, ce qui a conduit, dans de nombreux pays, à une restriction ou une interdiction progressive de leur usage.

Pesticides fluorés

Depuis les années 2000, plus de la moitié des nouvelles matières actives mises sur le marché sont des pesticides fluorés, c’est-à-dire des molécules contenant au moins un atome de fluor dans leur structure. Ces substances ne constituent pas une famille chimique homogène, mais sont réparties au sein de nombreuses familles de pesticides. En agrochimie, l’introduction d’atomes de fluor vise généralement à améliorer la stabilité, l’efficacité biologique, la lipophilicité ou la persistance des molécules. Toutefois, ces modifications peuvent également réduire leur biodégradabilité, augmentant ainsi leur persistance dans l’environnement.

Les pesticides fluorés font l’objet d’une attention croissante en raison de leur persistance, de leur faible biodégradabilité et de leurs liens potentiels avec les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS). Certains d’entre eux peuvent en effet former ou libérer des composés perfluorés extrêmement persistants, tels que le trifluoroacétate, ou appartenir eux-mêmes à la famille des PFAS. Ces caractéristiques soulèvent des préoccupations majeures quant à leurs impacts sur l’environnement et leurs effets potentiels sur la santé humaine (PestInfos, 2025).

Biodégradabilité et toxicité

Bien que certaines molécules de synthèse puissent présenter des structures chimiques apparentées à des composés biologiques, les pesticides organiques de synthèse constituent des molécules nouvelles, absentes de l’environnement naturel. Selon leur nature chimique, ils peuvent se dégrader plus ou moins rapidement sous l’effet de la lumière (photolyse), de l’eau (hydrolyse) ou de l’activité microbienne des sols (biodégradation), en donnant naissance à des métabolites dont la toxicité peut être comparable, voire supérieure, à celle de la molécule initiale. Plus stables et moins biodégradables que les substances d’origine naturelle, un grand nombre de ces pesticides présentent une forte rémanence environnementale et une mobilité élevée, leur permettant de persister dans les sols et de se transférer vers les milieux aquatiques par ruissellement ou lessivage. .

Certains pesticides de synthèse, leurs produits de dégradation et leurs résidus peuvent ainsi contaminer durablement les sols, les eaux de surface, les nappes phréatiques, les sédiments, l’atmosphère et les denrées alimentaires. Aujourd’hui, la majorité des fruits et légumes, ainsi que de nombreux cours d’eau traversant les zones agricoles, contiennent des traces mesurables de pesticides de synthèse, souvent sous forme de mélanges complexes.

Une étude scientifique (Sackey et al., 2024, Agriculture Discover) met en avant que les résidus dans les fruits, légumes et denrées proviennent souvent d’applications incorrectes ou de périodes post-récolte insuffisantes. L’article souligne le besoin de régulations plus strictes, du respect des limites maximales de résidus (LMR) et de pratiques agricoles durables (comme la lutte intégrée contre les nuisibles) pour réduire l’exposition et protéger la santé humaine.

Processus de pollution de l'environnement par les pesticides Crédit : Spedona (travail personnel d'après Roy batman), sous licence public CC BY 3.0

Les molécules les plus stables et lipophiles peuvent en outre être bioaccumulées dans les organismes vivants et se transmettre le long de la chaîne alimentaire, conduisant à une contamination des tissus animaux et humains (tissus adipeux, lait maternel, sang, urine, cheveux).

Conçus pour être biologiquement actifs, les pesticides organiques de synthèse interagissent inévitablement avec des organismes non ciblés, y compris l’être humain et les écosystèmes, générant des effets indirects et parfois différés, susceptibles de persister sur le long terme. De nombreuses molécules présentent une toxicité aiguë ou chronique pour des organismes non cibles tels que les microorganismes du sol, les invertébrés, les batraciens, les oiseaux et les mammifères, y compris l’être humain, chez lequel elles peuvent causer des intoxications ou être associées à divers troubles et pathologies. Le niveau de toxicité et de danger dépend de la dose, du type de pesticide, et de la durée d’exposition

Par ailleurs, leur mode d’action souvent très spécifique, ciblant un site moléculaire précis, favorise l’émergence de résistances chez de nombreux insectes ravageurs, vecteurs, adventices et champignons en cas d’usage intensif et répété. 

Paradoxalement, cet usage intensif peut ainsi fragiliser les agrosystèmes qu’il vise à protéger, en perturbant des services écosystémiques essentiels à l'agriculture tels que la décomposition de la matière organique, le recyclage des nutriments, la pollinisation et le contrôle biologique naturel. Il en résulte :
  • une altération de l’activité biologique et de la fertilité des sols, liée à la destruction de microorganismes et d’invertébrés clés (mycorhizes, décomposeurs, fixateurs d'ozone, coléoptères, vers de terre, etc.);
  • une atteinte aux pollinisateurs (abeilles, bourdons, lépidoptères) et aux auxiliaires de cultures (prédateurs, parasitoïdes), notamment par certains insecticides actifs à très faibles doses (néonicotinoïdes);
  • un renforcement des pressions de sélection, conduisant à une escalade dans l’usage des pesticides et à l’amplification de leurs impacts environnementaux.


Toxicité et impact environnemental  

L’utilisation des pesticides ne se limite pas à leurs effets sur les organismes ciblés. Une fois appliquées, ces substances peuvent se disperser dans l’environnement (sols, eaux, air), persister plus ou moins longtemps, se transformer en métabolites ou résidus parfois aussi toxiques que la molécule initiale, et affecter des organismes non cibles, y compris l’être humain.

Sur le plan environnemental, les pesticides peuvent contribuer à la dégradation des écosystèmes, notamment par la contamination des milieux aquatiques, la diminution de la biodiversité, l’impact sur les pollinisateurs, la faune du sol et les chaînes alimentaires. Certains composés présentent des propriétés de bioaccumulation, amplifiant leurs effets à long terme et à l'échelle des réseaux trophiques.

Du point de vue sanitaire, l’exposition humaine peut être professionnelle, environnementale ou alimentaire. Les effets sur la santé varient selon la nature de la substance, la dose, la durée et la voie d’exposition. Ils peuvent être aigus (intoxications) ou chroniques, avec des effets potentiels sur les systèmes neurologique, endocrinien, reproducteur ou immunitaire, ainsi qu’un risque accru de certains cancers.

Afin d’évaluer et de comparer ces risques, plusieurs organismes internationaux ont développé des classifications de référence, fondées sur des critères toxicologiques, épidémiologiques et expérimentaux. Parmi les plus utilisées figurent :

  • la classification de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), axée sur la toxicité aiguë des pesticides,
  • la classification du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), portant sur le potentiel cancérogène,
  • la classification des pesticides hautement dangereux (HHPs / HPPS), qui combine critères sanitaires et environnementaux.

Ces classifications offrent des outils complémentaires pour mieux appréhender les dangers associés aux pesticides et orienter les politiques de prévention et de gestion des risques.. Les liens entre pesticides, santé humaine et environnement seront approfondis dans des pages dédiées : ➤  Pesticides et santé et Pesticides et environnement (En cours de construction).

La Convention de Stockholm vise à éliminer ou à restreindre à l’échelle mondiale les polluants organiques persistants (POPs), parmi lesquels figurent plusieurs pesticides. Les POPs se caractérisent par leur forte persistance dans l’environnement, leur capacité de bioaccumulation dans les organismes vivants, leur toxicité pour la santé humaine et les écosystèmes, ainsi que leur transport à longue distance. Parmi les pesticides classés comme POPs, on distingue :
  • Liste d’élimination (Annexe A) : aldrin, chlordane, chlordecone, dicofol, dieldrin, endrin, endosulfan, heptachlor, lindane, mirex, pentachlorophenol (ainsi que ses sels et esters), toxaphène, ainsi que chlorpyrifos (inscrit en 2025, avec des exemptions spécifiques).
  • Liste de restriction (Annexe B) : DDT, dont la production et l’utilisation sont strictement limitées; certaines utilisations très spécifiques peuvent toutefois être autorisées, notamment pour la lutte anti-vectorielle contre le paludisme, sous conditions et en l’absence d’alternatives appropriées.

D’autres cadres d’évaluation existent, notamment les classifications réglementaires (SGH/CLP), les critères de perturbation endocrinienne, ou encore les approches écotoxicologiques (PBT, POPs).

 

Classification des pesticides selon leur toxicité aiguë pour la santé humaine (OMS)

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) classe les pesticides selon leur toxicité aiguë, principalement sur la base de la DL50 orale et cutanée chez le rat : 

  • Pesticides extrêmement dangereux (classe Ia)
  • Pesticides hautement dangereux (classe Ib) 
  • Pesticides modérément dangereux (classe II)
  • Pesticides légèrement dangereux (classe III)
  • Pesticides peu susceptibles de présenter un danger aigu en usage normal (classe U pour Unclassified)

➤ Classification OMS recommandée des pesticides en fonction des dangers qu’ils présentent, disponible en pdf : https://www.who.int/fr/publications/i/item/9789240005662

Cette classification OMS repose uniquement sur la toxicité aiguë, c'est à dire au risque dû à une exposition unique ou de plusieurs expositions sur une période relativement courte, et ne préjuge pas des effets chroniques ou environnementaux. Les insecticides, qui sont majoritairement des neurotoxiques, sont généralement plus toxiques pour l'être humain que les herbicides ou les fongicides.

Exemples de pesticides classés selon leur toxicité aigue par l'OMS

 Pesticides les plus dangereux (clasées Ia ou Ib), hautement toxiques et à usage restreint

  • Carbamates insecticides : aldicarbe (Ia), carbofuran (Ib), etc.
  • Oranosphorés insecticides : parathion (Ia). dichlorvos (Ib), méthomyl (Ib), etc.
  • Insecticides d'origine naturelle : avermectine (Ib), nicotine (Ib)
  • Pesticide / conservateur du bois : pentachlorophénol (PCP)

Note: Les pesticides appartenant aux classes Ia et Ib sont considérés comme extrêmement dangereux (Highly Hazardous Pesticides, HHP) et font l'objet d'une attention particulière au niveau international (FAO). 

Pesticides modérément dangereux (classe II)

  • Organophosphorés : chlorpyrifos, malathion, diazinon, etc.
  • Organochlorés : DDT, chlordane, endosulfan, etc.
  • Carbamates : carbaryl, carbosulfan
  • Pyrethrinoïdes : perméthrine, cyperméthrine, deltaméthrine, fenvalérate, pyréthrines naturelles
  • Néonicotinoïdes : acétamipride, imidaclopride
  • Fipronil 
  • Herbicides : 2,4‑D, alachlore, dicamba, diquat et paraquat, glufosinate-ammonium, etc. 
  • Fongicides minéraux à base de cuivre : sulfate de cuivre, oxyde cuivreux 
  • Organostanique : tributylétain

Pesticides légèrement dangereux (classe III) ou peu susceptibles de l'être (U)

  • Herbicides : atrazine (III), gyphosate (III), etc
  • Fongicides : carbadenzime (III), chlorothalonil (U), mancozèbe (U), thiabendazole (III), etc.
  • Insecticides microbiens : Bacillus thuringiensis (Bt) (III), spinosad (III)
  • Pesticides minéraux : souffre (III), fosétyl-aluminium (U)
  • Régulateurs de croissance des insectes : diflubenzuron (III), méthoprene (U), etc.

La toxicité aiguë des pesticides correspond aux effets immédiats ou à court terme résultant d’une exposition unique ou brève à une substance chimique. Les symptômes les plus fréquents incluent des troubles digestifs, neurologiques, respiratoires ou cutanés, et dans les cas graves, des atteintes cardiovasculaires ou respiratoires pouvant mettre en jeu le pronostic vital. L’exposition peut se produire par inhalation, contact cutané ou ingestion, et est généralement liée à des accidents professionnels, à des usages inappropriés ou domestiques, ou encore à des tentatives de suicide. 

On estime que des centaines de millions de personnes subissent chaque année un empoisonnement aigu non intentionnel par des pesticides, avec plusieurs milliers de décès, surtout en Asie du Sud et de l’Est. L’exposition se produit non seulement au travail mais aussi via l’environnement pour le grand public (Adam et al., 2024, Toxics). Par ailleurs, les formulations commerciales comme les co‑formulants peuvent augmenter significativement la toxicité par rapport à l’ingrédient actif principal seul.


Classification des pesticides selon leur potentiel cancérogène (OMS / CRIC)

Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC / IARC) classe les agents chimiques en groupes selon les preuves scientifiques de leur capacité à causer le cancer. La classification du CIRC reflète le danger intrinsèque (le potentiel d’une substance à provoquer le cancer) et non le risque réel d’exposition dans des conditions normales d’usage, qui dépend de la dose, la durée d’exposition et les conditions de travail. Le CIRC n’évalue pas tous les pesticides existants, mais seulement ceux étudiés dans ses monographies.

➤ Référence officielle : OMS / CIRC. Agents Classés par les Monographies du CIRC, Volumes 1–140, https://monographs.iarc.who.int/fr/agents-classes-par-les-monographies-du-circ-2/

 

Groupe 1 – Cancérogène avéré pour l’humain

Preuves suffisantes chez l’humain établissant un lien causal avec le cancer (données épidémiologiques)

  • Arsenic et composés arsenicaux (utilisés historiquement comme pesticides minéraux ou composants) : divers cancers observés chez l'humain
  • Lindane (insecticide organochloré) : lymphome non hodgkinien
  • Pentachlorophénol (PCP) (fongicide /bois)

Groupe 2A – Probablement cancérogène pour l’humain

Preuves insuffisantes chez l’humain et preuves suffisantes ou limitées chez l’animal, avec mécanismes non clairement pertinents pour l’humain; indice raisonnable qu’une substance peut causer le cancer chez l’humain, mais preuve pas encore solide et complète. preuves limitées chez l’humain mais suffisantes chez l’animal expérimental ou mécanismes plausibles. La substance peut causer le cancer chez l’humain, mais les preuves ne sont pas encore clairement établies. 

  • DDT (insecticide organochloré) : cancers foie, sein, lymphome non hodgkinien
  • Malathion (insecticide organophosphoré) : lymphome non hodgkinien
  • Diazinon (insecticide organophosphoré) : cancers poumon, lymphome
  • Glyphosate (herbicide) : lymphome non hodgkinien [IARC Monograph on Glyphosate, 2018]
  • Atrazine (herbicide triazine) : lymphome non hodgkinien
  • Alachlore (herbicide chloroacetanilide) : cancer du larynx (observations épidémiologiques limitées chez l'humain); diverses tumeurs chez l'animal

Groupe 2B – Possiblement cancérogène pour l’humain

Preuves insuffisantes chez l’humain et preuves suffisantes ou limitées chez l’animal avec mécanismes non clairement pertinents pour l’humain.

  • Chlordane, Heptachlor (insecticides organochlorés)
  • Parathion (insecticide organophosphoré) : cancers non spécifiques
  • Tetrachlorvinphos (insecticide organophosphoré)
  • Chlorothalonil (fongicide organochloré) : cancers observés chez le rat (rein) et la souris (estomac); interdit dans l'UE
  • 2,4-D (herbicide phényloxyacétique) : lymphomes suspectés; autorisé avec restrictions

Groupe 3 – Inclassable

Une grande partie des pesticides évalués par le CIRC sont dans cette catégorie, ce qui signifie que les données disponibles ne sont pas suffisantes pour conclure à une cancérogénicité chez l’humain. Par exemple, la perméthrine (pyréthrinoïdes) ou l'imidaclopride (néonicotinoïdes). 

Groupe 4 – Probablement non cancérogène

Preuves suggérant l’absence de cancérogénicité. Aucun pesticide d’usage courant actuellement classé dans ce groupe. 

De nombreuses études scientifiques et épidémiologiques suggèrent des liens entre l’exposition aux pesticides et divers effets sanitaires, notamment chez les agriculteurs et autres professionnels. Parmi les associations les plus documentées figurent le développement de lymphomes non hodgkiniens, de leucémies, ainsi que de certains cancers solides tels que ceux de la prostate, du poumon et du côlon.

Au-delà du risque cancérogène, l’exposition à certains pesticides a également été associée à plusieurs autres maladies et troubles chroniques, incluant : la maladie de Parkinson (reconnue comme maladie professionnelle en France), les troubles cognitifs et moteurs, les perturbations hormonales et reproductives, ainsi que des problèmes respiratoires tels que les bronchopneumopathies chroniques, et des dysfonctionnements thyroïdiens. De plus en plus d'études sont aussi réalisées auprès de la population générale exposée via l'environnement ou l'alimentation (résidus, eau potable, air) ou auprès des groupes plus vulnérables comme les femmes enceintes et les jeunes enfants. 

Une revue d'expertise de l’Inserm, publiée en 2013 et mise à jour en 2021, recense l’ensemble des travaux scientifiques disponibles sur ces effets sanitaires, confirmant l’existence de preuves épidémiologiques solides pour certains cancers et troubles neurologiques, et des présomptions pour d’autres pathologies encore en cours d’étude.

➤  Inserm, 2021. Pesticides et santé – Nouvelles données, https://www.inserm.fr/expertise-collective/pesticides-et-sante-nouvelles-donnees-2021/

Note :  Il existe une grande diversité de pesticides et chacun a un profil toxique différent. Les effets observés dépendent du niveau, de la durée et du type d’exposition (professionnelle vs environnementale vs alimentaire). Les études épidémiologiques montrent des associations, mais déterminer la causalité reste complexe et requiert encore des recherches approfondies (Shekhar, 2024, Toxicol Rep)


Pesticides hautement dangereux (HHP)

Plusieurs substances actives sont aujourd’hui identifiées comme pesticides hautement dangereux en raison de leurs effets potentiels ou avérés sur la santé humaine et sur l'environnement et la faune. La notion de pesticides hautement dangereux (Highly Hazardous Pesticides, HHP) repose sur les critères définis par la FAO et l’OMS, qui vont au-delà de la seule toxicité aiguë (immédiate) pour intégrer la toxicité chronique (à long terme), la persistance dans l’environnement et l’écotoxicité. Ces critères servent à identifier les substances présentant un risque élevé pour la santé humaine et l’environnement.

Sur cette base, des listes indicatives de HHP ont été établies par des organisations spécialisées, notamment PAN International, qui compile les substances répondant à ces critères et celles inscrites dans des conventions internationales comme la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants (POPs).

Ainsi, un même pesticide peut présenter simultanément plusieurs types de danger, par exemple : toxicité aiguë, effets chroniques sur la santé, persistance dans l’environnement et écotoxicité pour les organismes non cibles.

Cette classification des pesticides hautement dangereux est inspirée de la liste PAN HHP (PAN International, 2022), qui reprend les critères FAO/OMS et les conventions internationales.

➤ PAN International (2024). PAN International List of Highly Hazardous Pesticides. Disponible en pdf sur : https://pan-international.org/wp-content/uploads/PAN_HHP_List.pdf

La classification environnementale des pesticides repose sur l’évaluation de plusieurs critères déterminant le risque écologique global. Les principaux facteurs sont : 
  • la persistance (capacité à rester actif dans l’environnement)
  • la mobilité (propension à contaminer les sols et les eaux)
  • la bioacumulation (capacité à s'accumuler dans les chaines alimentaires) 
  • l’écotoxicité (toxicité et impacts sur les organismes non ciblés tels que faune et flore aquatiques, daphnies, abeilles, vers de terre ou oiseaux, etc.). 
Ces propriétés expliquent la diminution de la biodiversité et les perturbations des écosystèmes, et peuvent être renforcées par l’usage répété de substances favorisant l’apparition de résistances chez certaines espèces nuisibles. Le changement climatique et la résistance croissante des organismes nuisibles poussent à utiliser des pesticides en plus grandes quantités et plus fréquemment, élevant potentiellement le niveau d’exposition humaine (Adam et al., 2024, Toxics).


Pesticides à toxicité aiguë très élevée pour la santé humaine

Classés OMS Ia (extrêmement dangereux) ou OMS Ib (hautement dangereux), ces pesticides ont une DL50 très faible, ce qui signifie qu'ils ont une toxicité immédiate par ingestion, inhalation ou contact très élevée et potentiellement fatale. Ils sont majoritairement interdits ou très réglementés dans de nombreux pays en raison du risque direct pour la santé humaine et des intoxications fréquentes dans les milieux professionnels et domestiques.

Exemples de matières actives représentatives 

  • Insecticides organophosphorés très toxiques
    • Parathion
    • Monocrotophos
    • Méthamidophos : hautement toxique par inhalation (H330) ; organophosphoré responsable d’intoxications aiguës sévères.
  • Carbamates insecticides très toxiques : 
    • Carbofuran : hautement toxique par inhalation (H330) ; impliqué dans de nombreux empoisonnements de la faune et de l’homme.
    • Aldicarbe parmi les plus toxiques jamais commercialisés.
  • Paraquat / Paraquat dichloride (herbicide, bipyridine) : Hautement toxique par inhalation (H330) ; responsable de nombreuses intoxications humaines, pas d’antidote efficace

Pesticides à toxicité chronique très élevée pour la santé humaine

Ces substances sont classées comme cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques (effets sur la reproduction) (CMR – catégories 1A ou 1B) et sont souvent des perturbateurs endocriniens avérés. Bien que leur toxicité aiguë puisse être moins préoccupante, les effets chroniques peuvent entraîner des maladies graves, notamment en cas d’exposition prolongée à faibles doses. En raison des risques liés à l’exposition chronique à faibles doses, leur usage peut être suspendu ou strictement réglementé ou encore être interdit dans certains contextes ou certains applications.

Exemples de matières actives représentatives 

  • Certains insecticides organochlorés persistants : lindane (γ-HCH), chlordécone
  • Certains fongicides anciens : pentachlorophénol, chlorothalonil
  • Rodenticides anticoagulants
  • Thirame : mutagène (Muta 1B), reprotoxique (Repro 1B) selon le règlement CLP
  • Atrazine Herbicide perturbateur endocrinien (effets hormonaux documentés).
  • Mancozèbe : perturbateur endocrinien
  • Chlorpyrifos : Perturbateur endocrinien (EU EDC) et neurotoxique ; effets avérés sur le développement neurologique chez l’enfant.
  • Pentachlorophénol (PCP) : Classé cancérogène et perturbateur endocrinien ; substance persistante, historiquement utilisée comme fongicide et insecticide.
  • Glyphosate : classé cancérogène probable (CIRC 2A) ; effets chroniques débattus ; suspicion de perturbation endocrinienne selon plusieurs études scientifiques.
 

Pesticides persistants, bioaccumulables et toxiques

Ces pesticides se caractérisent par une longue durée de vie dans l'environnement, une bioaccumulation dans les organismes vivants (via les chaines alimentaires) et une toxicité et écotoxicité élevées à long terme. Leur présence durable dans les sols, les sédiments, l'eau et la chaîne alimentaire peut justifier leur inscription dans des conventions internationales, notamment la Convention de Stockholm sur les Polluants Organiques Persistants (POP) qui interdit ou limite strictement leur usage, ou encore le protocole de Montréal sur les produits chimiques appauvrissant al couche d'ozone. 

Exemples de matières actives représentatives 

  • DDT : Classé cancérogène probable (IARC) et perturbateur endocrinien ; pesticide organochloré persistant et bioaccumulable (POP), interdit mais encore présent dans l’environnement.
  • Endosulfan : Très toxique pour l’environnement, persistant ; inscrit à la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants (POP)
  • Chlordécone
  • Certains pesticides fluorés persistants : ex. PFAS-like substances
  • Anticoagulants de seconde génération (brodifacoum, bromadiolone)
  • Bromure de méthyle : fumigant à large spectre classé comme produit chimique appauvrissant la couche d'ozone et interdit selon le protocole de Montréal
 

Pesticides à fort impact environnemental (écotoxicité élevée pour les organismes non cibles)

Ces pesticides sont particulièrement toxiques pour les pollinisateurs (notamment les abeilles), ainsi que pour les organismes aquatiques et la faune terrestre. Ils entraînent souvent des effets sublétaux qui affectent la reproduction et la survie des espèces, ce qui peut avoir des conséquences écologiques graves à long terme (effondrements des populations documentés).

Exemples de matières actives représentatives 

  • DDT : oiseaux (bioamplification)
  • Endosulfan : faune aquatique
  • Chlorpyrifos : organismes aquatiques
  • Carbofuran : oiseaux et invertébrés
  • Néonicotinoïdes (Imidaclopride, Clothianidine) : forte toxicité pour les abeilles; effets sublétaux (désorientation, baisse de reproduction)
  • Fipronil : très toxique pour organismes aquatiques et invertébrés
  • Pyréthrinoïdes (deltaméthrine) : forte toxicité pour les organismes aquatique
 

Pesticides largement utilisés à risque diffus

Ces pesticides sont problématiques en conditions d’usage réel. Leur usage massif et diffus dans l’environnement entraîne une exposition chronique généralisée, avec des résidus retrouvés dans l’environnement et dans les produits alimentaires. Ces substances sont souvent responsables de poisonnements accidentels chez les travailleurs agricoles et dans les populations rurales. Leurs impacts sanitaires et environnementaux peuvent être débattus. 

Exemples de matières actives représentatives 

  • Paraquat : intoxications humaines fréquentes (empoisonnements accidentels ou suicides), forte présomption de lien avec la maladie de Parkinson (reconnue comme maladie professionnelle en France)
  • Monocrotophos  : insecticide (accidents professionnels)
  • Carbofuran : carbamate  insecticide responsable d'empoisonnement de la faune sauvage

 

Bases de données

Agritox, base de données sur les produits phytopharmaceutiques (Anses, France)
https://www.data.gouv.fr/datasets/base-de-donnees-agritox/

E-phy, catalogue des produits phytopharmaceutiques et de leurs usages, des matières fertilisantes et des supports de culture autorisés en France
https://ephy.anses.fr/

EU Pesticides Database 

EXTOXNET, The extension toxicology network : Pesticide Information Profiles (PIPs)
https://extoxnet.orst.edu/pips/ghindex.html

Compendium of Pesticide Common Names, Classified Lists of Pesticides (Alan Wood) www.alanwood.net/pesticides/class_pesticides.html

Office of Pesticide Programs (EPA)
https://ordspub.epa.gov/ords/pesticides/f?p=chemicalsearch:1

PAN Pesticide Database, Pesticide Action Network, Kegley, S.E., Hill, B.R., Orme S., Choi A.H, (Oakland, États-Unis) :
www.pesticideinfo.org

Pesticide Properties DataBase (PPDB) (University of Hertfordshire, Grande-Bretagne) :
http://sitem.herts.ac.uk/aeru/ppdb/en/index.htm

Portail de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur les pesticides.
www.who.int/teams/environment-climate-change-and-health/chemical-safety-and-health/health-impacts/chemicals/pesticides 

PubChem, Base de données du NIH

SAgE Pesticides (CRAAQ, Québec) :
www.sagepesticides.qc.ca/

 

Olivier Peyronnet
Page en cours de révision - Décembre 2025 
Mises à jour : 2018, 2025
Mise en ligne : 2015 




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