Mycorhizes

Les mycorhizes sont des associations symbiotiques entre les mycéliums de champignons et les racines des plantes. Elles forment un organe nutritionnel bénéfique pour les deux partenaires :

  • La plante fournit au champignon des sucres via la photosynthèse, mais aussi des lipides, des vitamines et des hormones de croissance qui stimulent sa fructification;
  • En retour, le champignon fournit de l'eau, des sels minéraux (notamment du phosphore) et de l'azote (via des acides aminés) à la plante en plus de protéger ses racines contre les agents phytopathogènes, les parasites et les stress environnementaux comme l'asséchement du sol ou l'excès de calcium. En plus d'accroître la surface d'échange avec le sol, les filaments fongiques (hyphes) sécrètent des enzymes dans le sol qui mobilisent les sels minéraux, favorisant ainsi leur absorption par les racines de la plante. Si la plante ne fournit pas assez de sucres au champignon, celui-ci peut devenir parasite.

Le champignon mycorhizien peut établir une symbiose avec une seule espèce végétale ou, plus souvent, avec plusieurs espèces appartenant à différents groupes de plantes. Inversement, une plante peut également s’associer à divers champignons mycorhiziens au cours de sa vie ou selon les conditions du sol.

La très grande majorité des plantes vasculaires terrestres (entre 90 et 95%) entretiennent de telles relations symbiotiques avec une ou plusieurs espèces de champignons mycorhiziens, principalement des Ascomycètes, des Basidiomycètes et des Glomeromycètes. Outre les plantes à fleurs et les conifères, de nombreux bryophytes et fougères sont mychorhyziennes. 

On distingue deux grands types de mycorhizes :

  • Les ectomycorhizes qui forment un manchon de mycélium autour des racines des plantes, surtout des arbres et des arbustes comme les chênes, les hêtres, les bouleaux et les pins. Ce sont principalement des Ascomycètes (morilles, truffes) et des Basidiomycètes (bolets, cèpes, amanites). Très abondantes sous les climats froids et tempérés, les ectomycorhizes jouent un rôle écologique essentiel dans l'équilibre des écosystèmes forestiers des forêts boréales (taïga) et des forêts de feuillus
  • Les endomycorhizes déploient des hyphes qui pénètrent à l'intérieur des cellules racinaires sans modifier l'aspect extérieur des racines. Les champignons endomycorhyziens impliqués sont principalement des Gloméromycetes. Ils ne forment pas de structures visibles. Ce type de mycorhize est le plus fréquent et se trouve dans près de 80% des plantes vasculaires, notamment chez les herbacées des régions tempérées (céréales, légumineuses) et les plantes tropicales. Elles jouent donc un rôle essentiel en agriculture pour la croissance des plantes cultivées.
Dans les ectomycorhizes (à gauche), les hyphes pénètrent dans l'espace intercellulaire (entre les parois cellulaires) du cortex racinaire, sans jamais pénétrer à l'intérieur des cellules; ils forment un manchon superficiel protecteur qui accroit la surface d'échange avec le sol. Dans les endomycorhizes (à droite), les hyphes traversent les parois cellulaires et forment de petites excroissances ramifiées appelées arbuscules qui facilitent les transferts de nutriments et des vésicules de stockage de réserves nutritives.  Crédit illustration: Nill-the-frog, travail personnel, via Wikipédia

 

Racines de pin de Monterrey (Pinus radiata) colonisées par les mycéliums de l'amanite tue-mouche (Amanita muscaria) qui forment un manchon blanc autour (ectomycorhize). Crédit photo: Randy Molina (US Forest Service), via Wikipédia.

 Il existe aussi deux formes particulières d'endomycorhizes, adaptées spécifiquement à deux familles de plantes :

  • Mycorhizes éricoïdes : Associées aux Éricacées (bruyères, bleuets, rhododendrons), elles permettent l’absorption de nutriments dans des sols très acides et pauvres grâce à des champignons ascomycètes qui colonisent les poils absorbants des racines.
  • Mycorhizes orchidéoïdes : Le champignon (souvent un basidiomycète saprophyte) fournit les nutriments nécessaires à la germination des graines d'orchidées, qui sont dépourvues de réserves nutritives. Sans champignons mychorhiziens, aucune graine d’orchidée ne peut germer naturellement. À l'état adulte, la relation peut rester mutualiste ou devenir déséquilibrée, la plante tirant du champignon plus qu'elle ne lui donne. 

En plus des plantes aquatiques, des plantes carnivores ou parasites, les Brassicacées (chou, colza, moutarde), les Amarantacées (betterave, épinard, quinoa) et les Caryophyllacées (œillets) sont parmi les rares plantes à ne pas entretenir de telles relations symbiotiques avec des champignons.

À l'extérieur des racines, les mycéliums forment un vaste et dense réseau de filaments fongiques (hyphes) qui accroit la surface d'échange entre les plantes et le sol. Ils stimulent l'activité microbienne du sol et contribue à l'agrégation de ses particules. 

Dans les sols naturels et non perturbés, les champignons mycorhiziens, associés aux racines des plantes, forment ainsi un vaste réseau souterrain appelé réseau mycorhyzien parfois surnommé le Wood Wide Web. Ce réseau peut relier les racines de plusieurs plantes d’un même écosystème et faciliter les transferts d’eau, de nutriments ou de signaux chimiques. Toutefois, la portée et l’importance de ces échanges entre plantes sont encore étudiées : si certains transferts bénéfiques sont bien documentés, d’autres effets plus spectaculaires évoqués dans les médias restent discutés et dépendent des espèces et des conditions écologiques (Karst et al., 2023, Nature Ecology & Evolution).  

En agriculture, les mycorhizes jouent un rôle essentiel : elles améliorent l’absorption de l’eau et des nutriments, renforcent la croissance des plantes et augmentent leur résistance aux maladies et aux stress abiotiques (sécheresses). La réduction du labour et des apports excessifs en phosphates favorisent leur implantation et leur efficacité.

En horticulture et en arboriculture, l’ajout de mycorhizes lors de la plantation d’arbres ou d’arbustes peut stimuler le développement initial, favoriser la croissance et accroître la tolérance aux stress environnementaux. Cependant, leur établissement peut être ralenti dans des sols trop secs, compactés ou fortement labourés ou perturbés.

La mycorhization par inoculation peut être utilisée en agriculture pour renforcer la résistance des plantes aux pathogènes du sol ou aux attaques des ravageurs. Ce phénomène, appelé résistance induite par les mycorhizes (MIR), implique l’activation de gènes de défense, la production de composés protecteurs comme les phénols, et même la compétition avec les pathogènes dans le sol. Par exemple, des études ont montré, entre autres, une meilleure résistance du blé mycorhizé à l’oïdium (Blumeria graminis) grâce à l’activation de défenses systémique ou encore l'absence de fusariose (Fusarium spp.) chez des tomates mychorizées. 

Certaines entreprises de biotechnologie agricole produisent et commercialisent des biofertilisants contenant des champignons Glomeromycota, sous formes de spores, de substrats enrichis ou de mélanges.  Ils sont cultivés en association avec des plantes hôtes (ils ne se cultivent pas sur des milieux artificiels), puis sont appliqués de différentes manières selon les cultures :

  • traitements ou enrobage des semences avec des spores ou fragments (céréales, légumineuses)
  • repiquage de plantules avec le substrat enrichi (tomates, fraises)
  • inoculation directe dans le sol (pour les arbres fruitiers, pommiers, olivier ou les vignes)
  • incorporation de spores dans le terreau ou compost (plantes ornementales, plantes sous serres) 

Ces biofertilisants sont utilisés pour renforcer la croissance des cultures et améliorer la santé des sols.

Les ectomycorhiziens (Basidiomycètes et quelques Ascomycètes) peuvent aussi être utilisés comme biofertilisants pour l’arboriculture et le reboisement, surtout pour améliorer l’établissement et la résistance des arbres sur sols pauvres ou stressés.


Olivier Peyronnet
Dernière mise à jour : novembre 2025 


 

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