La bactérie Bacillus thuringiensis ou Bacille de Thuringe, plus communément appelé Bt, est l'insecticide biologique le plus utilisé au monde, en agriculture biologique, en foresterie et dans la lutte contre les insectes vecteurs de maladies. Au Canada, il est très utilisé en foresterie pour lutter contre les épidémies de spongieuses (Lymantria dispar) et de tordeuses du bourgeon de l'épinette (TBE - Choristoneura fumiferana) et en santé humaine pour contrôler les insectes piqueurs, dont certains véhiculent le virus du Nil occidental (VNO). Ces dernières années, le Bt est aussi devenu une source importante de gènes pour créer de nouvelles plantes transgéniques tolérantes à certains insectes ravageurs. Utilisé depuis près de 50 ans, son mode d'action cellulaire et moléculaire fait toujours l'objet de recherches. Le Bt agit sur les insectes par l'intermédiaire de protéines toxiques produites sous forme d'un cristal, les toxines Cry. Après s'être fixées sur des récepteurs spécifiques, ces dernières perforent la paroi intestinale en y formant des pores ioniques et provoquent d'importantes perturbations physiologiques. En particulier, l'acidification du milieu intestinal qui en résulte favorise la germination des spores de Bt et la prolifération des bactéries intestinales endogènes dans l'hémolymphe, entraînant la mort des larves par septicémie. Les récents travaux de Nichole Broderick de l'Universté du Wisconsin montrent que les bactéries intestinales endogènes sont indispensables à l'action larvicide du Bt. En effet, après avoir détruit les bactéries intestinales de larves de spongieuse en leur administrant des antibiotiques oraux, elle a observé que les chenilles résistent à des doses très élevées de Bt. La réintroduction des différentes espèces d'entérobactéries (Enterobacter spp.) endogènes dans l'intestin des larves restaure l'activité larvicide du Bt. Contrairement au Bt qui est rapidement détruit dans l'hémolymphe, les bactéries E. coli génétiquement modifiées pour produire des toxines de Bt y prolifèrent et tuent les larves par septicémie y compris en l'absence d'entérobactéries. Par contre, si elles sont inactivées par la chaleur, les E. coli modifiées ne peuvent tuer les larves en l'absence des bactéries endogènes. Certains insectes, dont la spongieuse, sont en effet connus pour régénérer assez rapidement leur muqueuse intestinale. (OP)
Réf. : Broderick NA, Raffa KF, Handelsman J., 2006. Midgut bacteria required for Bacillus thuringiensis insecticidal activity. Proc Natl Acad Sci USA, Édition électronique avancée du 27 septembre 2006 [Résumé en anglais]
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